vendredi 21 novembre 2025

Editorial: Ne pas vendre la peau de l'ours....

 Un célèbre proverbe français nous apprend, à juste titre, qu’il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Lors de sa dernière visite au Hodh Ech-Chargui, Ghazouani l’a répété – mais indirectement – aux membres de son équipe, à ses soutiens et à tous ceux qui veulent l’enterrer tôt. Une campagne entamée au lendemain même de son investiture pour le second mandat, le troisième n’étant plus envisageable, en vertu de la Constitution. Depuis, ce bourdonnement ne s’est plus arrêté. Des journalistes (ou ce qui en tient lieu), des bloggeurs (pour ne pas dire blagueurs) et des influenceurs (pour ne pas dire influencés) sont mis à contribution pour vanter les mérites de tel ou tel successeur potentiel. La campagne a atteint un tel paroxysme que certains,comme le ministre des Affaires étrangères ou le directeur de cabinet du président de la République, se sont sentis obligés de sortir des rangs pour s’en démarquer ouvertement. Impassible jusqu’à présent, Ghazouani, piqué dans le vif, est finalement sorti du bois. À Timbédra, il a choisi ses mots pour dire à tous ceux qui s’aventurent déjà dans cette querelle de succession qu’elle n’a pas lieu d’être et qu’une équipe doit toujours tirer dans la même direction. Belle image pour un ancien militaire sachant, mieux que quiconque, qu’il ne faut jamais prêter le flanc à l’ennemi et qu’une compagnie minée par les divisions succombera aux premiers coups de l’ennemi. Sera-t-il entendu ? Faut-il plus qu’un discours pour mettre fin à la guerre des égos ? Car, pendant ce temps-là, les coupures d’eau et d’électricité se multiplient dans le pays, notamment à Nouakchott, et l’on aimerait vraiment beaucoup que le programme « Mon ambition pour la Patrie » débouche, si tel est vraiment le projet de notre Président, enfin sur autre chose que ces misérables bisbilles… 

 

                                                  Ahmed ould Cheikh

vendredi 14 novembre 2025

Editorial: A moins que.......

 On n’en attendait pas moins mais… mieux vaut tard que jamais ! Le Président l’a mis en exergue lors d’un speech prononcé à N’Beïket Lahwach et s’est montré ferme : tout fonctionnaire est un représentant de l’État, non seulement au bureau mais, également, en dehors de celui-ci. Il est donc inadmissible qu’il s’adonne à des pratiques que l’État reprouve. Sans la citer nommément, Ould Ghazouani fait une allusion à peine voilée à ce mal qui ronge la République : la tribu ; et qui a accompli un retour en force au cours des dernières années. Pour elle, les visites du Président à l’intérieur du pays sont des occasions rêvées de s’affirmer encore plus. Des défilés motorisés où l’on rivalise par le nombre de voitures sont organisées, des tentes dressées, des banderoles exposées et des affiches placardées en son nom… Pire, ses porte-paroles s’adressent directement à la presse (ou ce qui tient lieu) et ceux qui considèrent la leur exclue du gâteau que constituent les hautes fonctions n’hésitent pas à répercuter leurs jérémiades dans les réseaux sociaux. La coupe est désormais pleine et l’État ne pouvait plus continuer à rester les bras ballants face à un tel déferlement de bêtises. Il était grand temps que le Président tape du poing sur la table mais, dans certains cas où le corps est gangréné, les bonnes paroles ne suffisent plus. On se rappelle tous du fameux discours de Néma (tiens, tiens !) où Maaouya s’attaqua aux tribus, les accusant de tous les maux… avant qu’elles ne connaissent leur âge d’or sous son magistère ! Il avait certes besoin de leurs voix pour se faire élire, alors que pour celui qui ne brigue plus aucun suffrage, l’occasion est rêvée de laisser une empreinte dans l’histoire. À moins que…

 

                                                             Ahmed ould Cheikh

mercredi 5 novembre 2025

Editorial: Marchands de la mort

 Le docteur Nedhirou ould Hamed s’y essaya en son temps et fut emporté par le courant qui charrie tous ceux qui essayent de mettre un peu d’ordre dans le secteur pharmaceutique de notre pays. De prime abord, il fit respecter le principe de la distance entre les pharmacies et en fermer des dizaines, s’attaquant frontalement à ces marchands de la mort important des produits qui n’ont de médicaments que les noms. Avec de terribles conséquences. Combien de personnes sont mortes à cause de produits toxiques qui leur furent vendus sous cette mensongère appellation ? Combien d’autres se sont retrouvées avec des reins défaillants et condamnées, en conséquence, à la dialyse perpétuelle ? 

Certes, des efforts importants ont été fournis au cours des dernières années pour vérifier la traçabilité des médicaments et s’assurer de leur efficacité mais l’appétit sans limite des commerçants et les immenses profits qu’ils tirent de ce secteur empêchent toute réforme d’aboutir : ils sont prêts à y mettre les moyens. Tout responsable qui s’emploiera à déranger l’« ordre » bien établi se verra accuser de tous les péchés d’Israël, une virulente campagne de presse sera menée contre lui et, même s’il est la vertu incarnée, il sera dépeint sous les traits d’un diable incarné. Certains ont essayé de résister ; un temps… avant de passer à la trappe. 

Mohamed Mahmoud Ould Ely Mahmoud, le nouveau ministre de la Santé qui vient de se fendre d’une déclaration fracassante à l’Assemblée, en invitant les commerçants à laisser le domaine de la pharmacie aux professionnels, ira-t-il plus loin ? Sa carapace sera-t-elle plus résistante que celle de ses prédécesseurs ? Réponse dans quelques mois, lorsque la réforme sera mise en œuvre. Nouveau théâtre de la lutte contre la corruption : voyons si notre Président et son Premier ministre sauront s’y révéler à la hauteur de leurs vertueuses déclarations de principe, en soutenant sans aucune réserve ni défaillance leur homme lige.

 

                                                                              Ahmed ould Cheikh

mercredi 29 octobre 2025

Editorial: Ces « justiciers » acharnés derrière leurs claviers

 Ils sont camionneurs, livreurs de pizzas, plongeurs dans les restaurants, taximen, gardiens d’immeubles que l’ignorance crasse a chassés de leur pays. Les autres, locaux ceux-là, sont soit chômeurs désœuvrés, soit délinquants en rupture de ban, soit aigris par une vie qui a souri à d’autres. Tous ont un point commun : l’acharnement. Dès qu’une information, même fausse, est mise en ligne par un membre de ce clan, c’est le branle-bas de combat. Tous s’y mettent à fond. S’érigeant en politologues, économistes, statisticiens ou sociologues, ils inondent la toile d’analyses si peu brillantes et… tout y passe : les plus basses insultes, les plus gros mots et les plus ignominieuses bêtises ! Même le président de la République n’est pas épargné par ce torrent de boue immonde ! Il encaisse, tous les jours, invectives, injures et quolibets. Se cachant souvent derrière des pseudonymes, ils se croient tout permis. À visage découvert, certains d’entre eux commencent à avoir pignon sur rue. Ils sont quotidiennement suivis par des milliers de followers qui reprennent en boucle des propos pourtant loin de la réalité, décousus, où les règlements de comptes se sentent à plein nez. Témoin, s’il en est, de la déchéance d’une société qui a perdu ses repères, Umberto Eco avait on ne peut plus raison lorsqu’il disait que « les réseaux sociaux ont donné le droit de parole à des légions d'imbéciles qui, avant, ne parlaient qu'au bar et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite. Aujourd'hui, ils ont le même droit de parole qu'un prix Nobel. »

                                                                   Ahmed ould Cheikh

vendredi 24 octobre 2025

Editorial: Agir maintenant ; posément, certes, mais vite !

 Coupures d’eau, d’électricité et d’Internet récurrentes, alors que s’accroissent les difficultés à joindre les deux bouts – du mois, pour ceux qui ont la chance d’avoir un salaire régulier, aussi faible soit son montant –, voilà largement de quoi indigner nos populations devant les énormités des manquements gestionnaires relevés méthodiquement par la Cour des comptes et révélés tout dernièrement au grand public. La culture du vol en hauts lieux instaurée – que dis-je, magnifiée, protégée, encouragée –, faut-il se fâcher contre celle, galopante, des divers délits et crimes dans les banlieues éloignées du pactole ? On appelle, ici, à un renforcement de la répression policière, c’est tout-à-fait compréhensible… mais là-haut, on fait quoi ?

Il ne peut plus s’agir de limoger, quelque temps, avant de réintégrer ailleurs, en des postes à peine moins juteux ; sinon carrément plus. Ça suffit ! La coupe est archipleine et déborde depuis trop longtemps. Il faut im-pé-ra-ti-ve-ment sévir ! Marquer dé-fi-ni-ti-ve-ment une frontière, nette, entre les avantages normaux inhérents à une lourde tâche publique et les invraisemblables excès justement signalés par la Cour des comptes. Le peuple gronde. Et quoi ? C’est à une révolution effrénée que le régime actuel appelle ? On veut croire le président Ghazouani et ses vrais fidèles plutôt attelés à une franche et décisive réforme en profondeur, excluant, notamment et carrément, les tristes sires coupables de ces insupportables détournements de fonds. Plus de tergiversations ! Il s’agit maintenant d’agir ; posément, certes, mais vite !

                                                                            Ahmed ould Cheikh

mercredi 15 octobre 2025

Editorial: Trop, c'est trp!

 On ne le dira jamais assez. La lutte contre la gabegie, la mauvaise gestion et le détournement des deniers publics est un combat de longue haleine. Il ne suffit pas de la proclamer mais il faut la mettre en œuvre par des mesures fortes. Radicales, s’il le faut. Le dernier rapport de la Cour des comptes, qui vient d’être mis en ligne sur le site de cette institution – une mesure louable qui a au moins l’avantage de désigner les coupables de malversations à la vindicte populaire, à défaut d’une cour de justice – indique qu’on est loin d’être sortis de l’auberge. À parcourir le rapport, on ne peut qu’être pris de vertige devant l’ampleur du gâchis. Des milliards volatilisés, des procédures violées au grand jour, des marchés fractionnés pour être attribués sans appel d’offres, des recrutements de complaisance, des comptes ouverts et approvisionnés en violation flagrante de la loi, des créances irrécouvrables par absence de volonté… la liste est longue.

Le moins qu’on puisse dire est qu’en deux ans, les limiers de la Cour des comptes n’ont pas chômé. Ils ont repéré tellement d’irrégularités, là où ils sont passés, qu’ils ne savaient plus où donner de la tête. Et ils ne sont pas passés partout, en plus ! Des institutions qui ne sont pas loin de tout reproche, loin s’en faut, ont échappé à leur contrôle. En attendant le prochain tour ? On veut bien savoir pourquoi. Quelle suite sera donnée à ce rapport ? Les gestionnaires épinglés vont-ils répondre de leurs actes devant la justice ? Ou exigera-t-on seulement d’eux qu’ils remboursent les montants détournés… avant les maintenir en fonction, comme par le passé ? Il y a, en tout cas, urgence à frapper fort, pour mettre fin – sinon réduire sensiblement – des pratiques qui rongent le pays. Invité, il y a quelques années, d’une émission de télévision, le contrôleur d’État Ethmane Sid’Ahmed Yessa avait dit, en réponse à une question sur les sanctions à infliger aux auteurs des détournements de deniers publics : « On ne peut quand même pas dupliquer des lois venues d’ailleurs et condamner ces fautifs à la peine de mort. » Ce à quoi répliqua le célèbre journaliste, feu Amar ould Bouhoubeyni : « En ce cas, nous perdrons beaucoup de nos vaillants hommes. » Mais aujourd’hui, soyons clair : trop, c’est trop ! Il faut agir ! Sans plus tarder !

Ahmed ould Cheikh

vendredi 10 octobre 2025

: Ould Diay: du nouveau à venir?

 C’est la question de la semaine : Après plus d’un an à la tête de la Primature, Ould Diay a-t-il réussi ou échoué ? A-t-il pu insuffler un sang nouveau à une institution qui en avait tant besoin ? Est-il parvenu à coordonner avec succès l’action d’un gouvernement dont il n’avait pas prise sur certains membres ? Ou n’a-t-il été, au contraire, que le premier des ministres, se contentant, comme tous ceux qui l’ont précédé, d’être un bon exécutant ? Ce qui est sûr, en tout cas, c’est qu’au début de son « mandat », Ould Diay a fait preuve de beaucoup de vivacité, multipliant réunion sur réunion et descentes sur le terrain pour constater, de visu, l’évolution de divers projets. Il a également proposé une restructuration de son cabinet super pléthorique pour en obtenir une équipe homogène, tirant dans la même direction. Mais, au bout de quelques mois, tout a semblé s’étioler. Au lieu d’être compressé, ledit cabinet s’est retrouvé étoffé par des parachutages venus de partout et la fougue a cédé la place au train-train quotidien. 

Pourtant, le PM ne désespère toujours pas. Ceux qui le connaissent de près affirment qu’il se révèle souvent fin manœuvrier et qu’il finira bien par faire pencher la balance dans le sens qu’il désire… pourvu qu’on lui en laisse le temps. Avec lui en tout cas, la Primature est devenue un centre d’intérêt. Personnage clivant, considéré, à tort ou à raison, comme l’un des hommes forts de la décennie azizienne, Ould Diay ne laisse personne indifférent. Sa résurrection, qui lui a permis de rebondir alors que tout le monde l’avait enterré, est le signe, pour certains, de sa capacité de manœuvre hors du commun ou, selon d’autres, de son étrange propension à se rendre indispensable. Quoi qu’on en dise, l’homme a, dans son sac, en tout cas plus d’un tour. On attend donc le prochain avec impatience ...

                                                         Ahmed ould Cheikh